Procréation avec donneurs

Pour certaines formes de stérilité masculine, ni les médicaments, ni la chirurgie ne peuvent grand-chose. L’assistance médicale à la procréation propose alors l’insémination avec sperme d’un donneur anonyme.
Méthode ancienne, âgée de plus de cent ans ! La première tentative couronnée de succès a été pratiquée en 1884 avec du sperme frais par l’Américain Pancoast.

La congélation du sperme, mise au point autour de 1960, a permis de développer la technique et de la rendre plus sûre d’un point de vue sanitaire. La congélation se fait en plongeant des paillettes dans de grosses bonbonnes d’azote liquide à – 196 °C.

Ces paillettes sont en fait de petites pailles contenant 0,20 ml de sperme préalablement traité et dilué dans un milieu cryoprotecteur composé de glycerol, de jaune d’œuf, de citrate et d’antibiotique. Ainsi traitées, les paillettes peuvent être conservées pendant plus de 10 ans sans que la capacité fécondante du sperme en soit altérée.

En France, en 20 ans, plus de 30 000 enfants sont nés grâce à cette méthode.

Plus de 4 000 demandes par an

Dans notre pays, la conservation et le don du sperme sont gérés principalement par la fédération des Cecos (Centre d’étude et de conserva-tion des œufs et du sperme). Créée en 1973, cette fédération compte 20 banques implantées dans des centres hospitaliers universitaires et réparties sur tout le territoire national. En dehors de cette fédération, il existe aussi 2 banques de sperme agréées par le ministère de la Santé.

Chaque année, quelque 3 000 patients s’adressent aux Cecos. En moyenne, le couple connaît sa stérilité depuis 7 ans et la femme est âgée de 31 ans. De plus, les Cecos accueillent environ 1 000 couples déjà parents d’enfant(s) né(s) par IAD et qui viennent pour tenter une 2e, voire une 3e naissance.

Le cadre éthique et législatif

Pour traiter ces patients, les Cecos ont constitué des équipes pluri-disciplinaires où sont associés biologistes de la reproduction, cliniciens (gynécologues, endocrinologues), généticiens, psychologues, épidé-miologistes, bactériologistes.

Leur travail est encadré par un code déontologique, identique depuis la création de la fédération.
■        Le don de sperme est bénévole : comme pour le sang et conformément à la politique adoptée en France pour les produits humains.
■        Le don de sperme est anonyme : chaque information concernant un donneur est gardée secrète et codée, pour respecter son anonymat et la confidentialité de sa démarche.
■        Le don de sperme est le don d’un couple ayant un ou des enfants à un couple en âge de procréer, vivant ensemble depuis deux ans et confronté à un problème de stérilité masculine (dans 90 % des cas) ou à un risque de transmission d’une maladie gravissime à la femme et à l’enfant. Tout autre cas, non motivé médicalement, n’est pas accepté.

Ces règles ont été reprises par la loi de bioéthique votée en 1994, mais tous les pays ne fonctionnent pas sur le même système.

ft à l’étranger ?

En Allemagne, le gouvernement a tenté d’interdire 1TAD en 1962. Mais la pratique existe, même si aucune loi ne l’encadre et que l’anonymat est constitutionnellement illégal.

En Suède, la loi permet à l’enfant, quand il a atteint l’âge de 16-18 ans, de connaître l’identité du donneur. Les parents ont seuls la responsabilité d’informer l’enfant de sa conception. Du coup, les renseignements concernant la mère et le donneur sont conservés pendant au moins 70 ans et le donneur doit être prêt à être contacté par l’enfant. L’insémination avec donneurs est réservée aux couples en cohabitation et est pratiquée dans les hôpitaux. Cette loi a eu deux effets : d’abord les donneurs ont été dans un premier temps un peu moins nombreux (il semble qu’aujourd’hui leur nombre remonte), ensuite, les couples, inquiets de cette révélation des origines, sont allés se faire soigner au Danemark. La loi précise que le don de gamètes est anonyme. Le secret de la conception est prioritaire pour les patients : seul un tiers dit qu’il informera les enfants.
 Mais en même temps, les couples désirent avoir des informations non identificatoires sur le donneur (son éducation, son origine sociale). Les donneurs danois tiennent aussi à l’anonymat : seulement 20 % d’entre eux affirment qu’ils continue-raient à donner leur sperme si leur identité était révélée.

En Espagne, l’anonymat et le bénévolat sont aussi la règle. Toutefois, contrairement à la France, il n’est pas nécessaire de vivre en couple pour en bénéficier. Des femmes célibataires peuvent y avoir droit. Même situation en Belgique, où aucune loi ne réglemente le don desperme : parmi la douzaine de banques privées ou affiliées au secteur universitaire, deux d’entre elles acceptent les femmes célibataires et une les couples de lesbiennes.

Presque autant de pratiques que d’États européens. Et plus loin encore, aux États-Unis, où l’on estime qu’il y aura 1,5 million d’enfants nés par IAD en l’an 2000, il existe aussi sur la côte Ouest une banque de « sperme de Nobel » : même si ses donneurs ne sont pas exclusivement des génies (mais doivent être blancs et faire la preuve de leur intelligence), cette banque dit travailler pour améliorer la race par la sélection. Malgré la réprobation de toute la communauté scientifique mondiale devant cette « escroquerie » à visée eugéniste, cette banque achète toujours du sperme à des hommes qui souhaitent ou non conserver l’anonymat, et la paillette est vendue fort cher à des femmes elles aussi triées : elles doivent avoir un QI supérieur à la moyenne. On est loin des principes éthiques en vigueur en France !

Ne nous enveloppons toutefois pas dans un voile de pudeur. Chez nous aussi, à la fin des années 1980, la presse s’était fait l’écho de vente illégale de sperme, allant même jusqu’à parler de « trafic ». Des hommes vendaient leur éjaculat entre 300 et 500 francs à des cabinets gynécologiques privés qui facturaient l’insémination quelque 1 500 francs pour un essai. Depuis, la crainte de transmission du sida a interdit, en 1991, l’utilisation de sperme frais. On ne voit plus, dans les journaux ou dans les facs, ces petites annonces recherchant des donneurs, est-ce à dire que ces pratiques ont pour autant disparu ?

En tout état de fait, les couples stériles doivent, s’ils veulent avoir au moins des garanties sanitaires, s’adresser aux Cecos ou aux banques agréées par le ministère de la Santé et qui sont soumises aux mêmes règles.

Les règles sanitaires pour les donneurs

Tous les candidats au don se soumettent à des examens cliniques, génétiques et de sperme, ainsi qu’à une étude bactériologique et à une prise de sang. Ces examens servent notamment à établir le caryotype du donneur, qui permet de déceler une modification chromosomique pouvant entraîner une malformation chez l’enfant, et à s’assurer que le donneur n’est pas porteur de maladies infectieuses, virales ou héréitaires. En ce qui concerne le sida, 2 prises de sang sont faites systématiquement à 6 mois d’intervalle. A l’issue de ces tests, plus de 60 % des candidats au don sont retenus.

Ces tests permettent aussi de « cataloguer » les donneurs : leur origine ethnique, la couleur de leur peau, de leurs yeux, leur taille, leur poids, leur groupe sanguin et leur facteur Rhésus sont soigneusement notés, afin de proposer au couple receveur un donneur présentant à peu près les mêmes caractéristiques que le conjoint, et de ne pas introduire, chez l’enfant qui pourrait naître, des caractères morphologiques n’existant pas chez ses parents.

Le sérieux du système français, non seulement dans la mise en fiche de ces renseignements, mais aussi dans le classement des paillettes fait que l’on n’a jamais entendu parler d’erreur dans l’appariement où un couple d’ethnie européenne s’était fait faire un enfant avec le sperme d’un homme de couleur.

De plus, dès que le sperme d’un même donneur a permis la naissance de cinq enfants dans des familles différentes, il n’est plus utilisé. Cette règle est censée limiter les risques de consanguinité et éviter que des enfants nés de l’IAD, mais ignorant être issus du même gène, ne se reproduisent entre eux.

Les inséminations sont ensuite réalisées par des gynécologues, soit dans leur cabinet, soit dans un hôpital ou une clinique.

L’intervention n’est ni douloureuse, ni lourde pour la patiente. Juste avant l’ovulation, le médecin, muni d’une seringue grande comme une aiguille à tricoter, dépose dans le col de l’utérus le contenu de la paillette. L’acte s’apparente à un examen gynécologique un peu délicat et nécessite ensuite seulement quelques instants de repos.

Les résultats

En moyenne, le taux de grossesse par tentative est de 10 %. Ce taux varie toutefois bien sûr en fonction de l’âge de la femme et de sa fécondité. Lorsque la femme est peu féconde ou stérile, une fécondation in vitro utilisant ses ovocytes et le sperme d’un donneur peut aussi êtretentée. Le taux de grossesse par tentative est ici de 24,5 %. Une fois la grossesse enclenchée, il y a encore 17 % de risques de fausse couche.

La difficulté du recrutement des donneurs

Comme pour toute assistance médicale à la procréation avec donneur, la principale difficulté réside dans le recrutement des donneurs. Leur faible nombre est la cause des délais d’attente : certains couples parlent de 4 mois, d’autre de 18… tout dépend des caractéristiques de l’homme stérile : si son ethnie, son Rhésus sanguin sont rares, il faudra plus de temps pour trouver le donneur correspondant. En général, il faut compter au moins un an.

Pour pallier ce manque, les Cecos ont pendant longtemps incité les couples à venir avec un donneur dont le sperme serait mis en banque et destiné à un couple inconnu d’eux. Venir avec un donneur, c’était aussi pour le couple gagner quelques places dans la file d’attente. Une faveur que la loi de bioéthique interdit aujourd’hui. Les Cecos voyaient pourtant un autre avantage à cette pratique : trouver un donneur, pour un couple, c’est aussi parler de sa stérilité à sa famille, à ses amis… C’est, nous le verrons plus loin avec les dons d’ovocytes, sortir du silence qui entoure le tabou de l’infertilité masculine et donc déjà l’accepter.
Chaque année, les Cecos ont besoin de 800 à 1 000 nouveaux donneurs pour satisfaire les 4 000 demandes annuelles d’IAD qui leur sont faites.

Les donneurs les plus motivés se recrutent souvent dans l’entourage des couples stériles qui souhaitent un enfant par don de sperme.

Pour devenir donneur, il faut avoir moins de 45 ans, être déjà père d’au moins un enfant, avoir l’accord de son épouse ou de sa compagne et se rendre plusieurs fois au Cecos pour les dons et les tests médicaux. S’il n’y a aucune rétribution, les frais de déplacement peuvent être remboursés. Une fois ses gamètes donnés, le donneur ne connaît jamais l’issue de son don, et n’aura jamais aucun contact avec le couple demandeur ni avec l’enfant issu de l’IAD.

Un don, geste généreux que l’on fait le plus souvent pour aider quelqu’un, plus rarement pour aider un groupe de personnes (ici, tous les couples stériles) dont on connaît les difficultés et les souffrances. Geste aussi que les équipes médicales entourent de toutes les précautions sanitaires. Pourtant, on ne peut s’empêcher, parfois, de penser avec un rien d’inquiétude à cet inconnu qui a permis d’engendrer.

Ces questions relatives à la génétique, les Cecos en parlent aussi avec les patients avant de commencer les inséminations. Ils donnent toutes les informations médicales afin de permettre à chacun de se déterminer le plus librement possible face à cette filiation.

Une filiation peu commune

Une filiation peu commune dont il est aussi question lors du suivi psychologique que proposent les Cecos. Ces entretiens ne sont nullement « un examen de passage », qui sélectionnerait les couples les plus « aptes » à l’insémination avec donneur ; ils sont au contraire une réflexion approfondie menée avec les patients, afin qu’ils puissent sereinement prendre leur décision. Ils permettent aussi de venir en aide si les tentatives se soldent par des échecs, ou si, durant ou après la grossesse, le couple désire parler de l’enfant, de la famille, du secret ou non de la conception.

En effet, dans 80 % des cas, l’homme infertile cache sa stérilité à sa famille. Logiquement, il ne tient donc pas à informer l’enfant.

Le don d’ovocytes

La première grossesse au monde avec don d’ovocytes date de 1984. Elle fut obtenue en Australie par Lutjen. La patiente était une jeune femme atteinte de ménopause précoce.

Une technique récente et bien maîtrisée


Depuis, ce don s’est considérablement développé et la technique est bien maîtrisée : la donneuse, après stimulation ovarienne, subit une ponction d’ovocytes par les voies naturelles, sous contrôle échographique, en hôpital.

 Les ovocytes prélevés sont immédiatement mis en contact avec le sperme du receveur, sperme qui peut être recueilli juste avant ou avoir été préalablement décongelé : on retrouve là la technique classique de fécondation in vitro. Les embryons obtenus seront implantés 48 heures après ou seront congelés.

En France, ce traitement est aujourd’hui proposé aux femmes présentant une ménopause précoce ou dont les ovaires ne fonctionnent pas (syndrome de Turner, traitement par radio- ou chimiothérapie) ou qui ont eu les ovaires enlevés après intervention chirurgicale. En général, l’intervention est bien appréhendée par les patientes receveuses, sans doute parce qu’elle est moins contraignante physiquement que les épreuves exploratrices (cœlioscopie, hystérographie…) qu’elles ont eu à subir précédemment.


Un don complexe

Mais le don d’ovocytes a ceci de particulier, par rapport au sperme, qu’il est plus complexe – la donneuse doit suivre un long traitement, agrémenté de dosages hormonaux et d’une ponction folliculaire sous anesthésie générale ou régionale – et qu’il ne fournit qu’un nombre limité d’ovocytes.

Enfin, toujours contrairement au sperme, la congélation de l’ovule, si elle a été tentée quelques rares fois avec succès – notamment en Australie -, était encore, en 1996, majoritairement vouée à l’échec. Ceci est lié au fait que les ovocytes recueillis sont bloqués au milieu d’une phase de division cellulaire qu’ils ne termineront qu’après avoir été fécondés.

Longue préparation de la donneuse et impossibilité de congeler les ovocytes font donc qu’il n’est pas envisageable de constituer une banque d’ovocytes comparable à une banque de sperme.

Face à ces difficultés, il ne reste plus aux équipes médicales que deux façons de trouver des ovocytes : le don direct ou le don anonyme. Dans le premier cas, la receveuse vient avec sa propre donneuse. Dans le second cas, comme pour le sperme, donneuse et receveuse ne se connaissent pas et les ovocytes sont attribués à une patiente qui aura la même couleur de peau, d’yeux, de cheveux et le même groupe sanguin que la donneuse.

En France, le don direct est interdit depuis la loi de bioéthique du 30 juillet 1994. Les donneuses doivent être anonymes, volontaires et non rémunérées. Elles doivent déjà avoir eu un enfant, leur conjoint doit être d’accord pour ce don. Leurs ovocytes sont destinés à soigner la stérilité d’une femme en âge de procréer et vivant en couple depuis au moins 2 ans. De plus, les hôpitaux, pour assurer une bonne qualité des ovules, imposent généralement que la donneuse ait moins de 35 ans. Enfin, pour des raisons sanitaires, la loi oblige à ne réimplanter que des embryons congelés.

Mais comme pour le don de sperme, la loi et les pratiques françaises ne sont pas universelles.

à l’étranger

Le Canada accepte des receveuses âgées de plus de 42 ans. La donneuse, elle, doit être âgée de 25 à 33 ans et avoir déjà eu 2 à 3 grossesses. Certaines cliniques se chargent de trouver des donneuses. Après fécondation in vitro, 2 à 3 embryons sont réimplantés, les autres étant congelés.

En Grande-Bretagne, la donneuse doit avoir au plus 35 ans et être déjà mère. Le don est en principe anonyme et gratuit. Le couple qui amènera une donneuse verra son délai d’attente, en moyenne de 2 ans, réduit. De même pour les patientes tentant une fécondation in vitro. Si elles obtiennent au moins 4 ovocytes et acceptent d’en donner la moitié, elles seront traitées en priorité ou une partie du coût de leur traitement sera pris en charge par la clinique. On appelle ça « l’échange de traitement ». Certaines cliniques rémunèrent des donneuses et l’on pense qu’il existe aussi des échanges d’argent entre donneuses et receveuses, d’autant qu’il y a un manque important de donneuses originaires des minorités ethniques.

Les receveuses âgées de 40 à 50 ans peuvent bénéficier d’un don d’ovocytes. Enfin, comme pour le sperme, la loi autorise l’enfant ainsi conçu à avoir, à 18 ans, des renseignements anonymes sur le donneur (profession, intérêts…). Mais la décision d’informer ou non l’enfant sur ses origines appartient au couple receveur.

Aux États-Unis, le don d’ovocytes est une intervention de plus en plus fréquente. Le problème du recrutement des donneuses est en partie résolu par leur rémunération : un don d’ovocytes se paie fréquemment autour de 2 000 dollars (10 000 francs). Les femmes en parcours de Fiv se voient parfois proposer un marché par les cliniques : un don d’ovocytes contre un rabais sur le prix de leur intervention ou la gratuité de leur propre traitement. Il existe aussi des femmes désirant se faire stériliser par ligature des trompes et qui, toujours moyennant la gratuité de l’intervention, acceptent au préalable un traitement pour don d’ovocytes.

Les États-Unis ne mettent pas de limite d’âge pour recevoir un don d’ovocytes : des femmes jusqu’à 50 ans se font traiter ainsi, qu’elles soient stériles ou ménopausées.

Plusieurs agences se sont même constituées pour organiser ce don : moyennant entre 16 000 et 20 000 dollars (soit de 80 000 à 125 000 francs), elles garantissent au couple receveur 2 implantations d’au moins 2 embryons, une première avec des embryons frais, la seconde avec des embryons congelés. L’agence envoie aux patients demandeurs un choix d’environ 20 femmes donneuses, « de jeunes femmes ayant un faible taux de fausses couches ». Une fois le choix effectué, la donneuse se soumet à tous les tests médicaux ; l’agence prend en charge toutes les formalités et coordonne les équipes médicales américaines et étrangères pour que receveuse et donneuse soient prêtes à la même date… Un acte qui, s’il reste anonyme et promet 50 % de résultats, n’est pas gratuit.

A l’inverse, en Belgique, le problème du recrutement des donneuses est contourné avec le don non anonyme : les couples viennent ici avec leur donneuse, souvent une parente proche de la receveuse, parfois une amie. Pour être acceptée, cette femme doit déjà avoir un enfant et avoir l’accord de son époux ou concubin. Les médecins préfèrent que les couples se connaissent mais ne se côtoient pas trop et ne vivent pas dans un voisinage immédiat.

En France, l’anonymat est exigé

La pratique du don direct, si elle a été longtemps possible en France, est depuis la loi de 1994 (lire page 217 l’annexe) interdite. Cette loi, qui est révisable tous les 5 ans, impose comme pour le sperme le don anonyme. Et il est désormais impossible de subordonner l’inclusion dans le programme de don au fait que la candidate fournisse une donneuse. Les couples se faisant soigner aujourd’hui ne connaissent donc pas la provenance des ovocytes et le couple donneur ne connaîtra jamais la destination de ces ovocytes.

Les résultats

Transfert d’embryons frais ou congelés, les résultats ne sont pas les mêmes. En France, les meilleures équipes disent obtenir un taux de grossesse par transfert d’embryons frais de l’ordre de 25 à 30 %, alors qu’avec des embryons congelés, ce résultat est de 15 à 20 %. Un hôpital a même chiffré à 20 % la perte d’embryons liée aux contraintes de la congélation. Les équipes médicales pratiquant aujourd’hui le don d’ovocytes doivent donc, pour obtenir les meilleurs résultats, maîtriser aussi parfaitement les techniques de congélation embryonnaire.

L’attente entre la première demande et le premier transfert d’em-bryons est en France très variable. Comme pour le sperme, elle dépend essentiellement des caractéristiques morphologiques et biologiques qui permettront l’appariement. La moyenne d’attente est de 18 mois, mais certains couples attendent parfois plus de 2 ans.

Très peu de donneuses volontaires

Très rares sont les femmes a priori volontaires pour un don d’ovo-cytes. Elles sont d’autant plus rares que la loi de bioéthique de juillet 1994 interdit l’information sur ces dons, en dehors de ce qui est organisé par le ministère de la Santé. En général, il s’agit de patientes ayant déjà eu un enfant, soit naturellement, soit par Fiv, et qui ont besoin pour leur deuxième enfant d’une assistance médicale. Elles acceptent alors de céder un ou plusieurs de leurs ovocytes au-delà du sixième ponctionné. Cependant, les succès de la congélation des embryons font que ces dons sont de moins en moins fréquents. Les donneuse font souvent preuve d’une grande solidarité féminine ; certaines disent aussi que c’est une façon pour elles d’« honorer » une dette face à l’institution médicale qui, espèrent-elles, leur offrira ce qui leur est le plus cher, un enfant.

Une femme exprime ainsi son malaise, sa crainte de voir s’en aller une partie d’elle-même :
« Dans le don anonyme, on donne ses ovocytes à n’importe qui, on ne connaît ni la destination, ni le destin de ses ovocytes. Ces dons peuvent avoir engendré des grossesses, des enfants, dont on ne sait rien. Il peut y en avoir beaucoup dans le monde, mais on ne les connaîtra pas. »

Une femme, passée du don direct au don secret, souligne, elle, la crainte de l’inceste que fait surgir toute procréation avec donneur anonyme.

« Y ai eu peur que mes ovules fécondés et réimplantés dans le corps d’une femme inconnue ne donnent une grossesse, puis un enfant que j’ai imaginé être un garçon. Ce garçon devenu adulte pourrait par hasard rencontrer une de mes filles, en tomber amoureux sans savoir que ce pourrait être sa sœur… Ceci ne doit pas arriver, je préfère vraiment donner à quelqu’un que je connais.1 »

L’anonymat du don a été choisi à l’origine par les législateurs pour « protéger l’enfant, afin que ce dernier ne puisse devenir l’enjeu de problèmes qui pourraient survenir entre donneurs et parents » et préserver l’image du couple. Certains centres de traitement ont mis en place des systèmes de don anonyme relationnel, où les patients viennent avec une femme qui se tient prête à entamer un traitement quand un autre couple dont elle ne connaît pas l’identité mais à qui elle sera « appareillée » aura besoin d’ovocytes. Sans subordonner le traitement des patients au recrutement d’une donneuse, ces centres tablent sur le fait naturel que plus nombreux seront les couples venant avec une donneuse, plus courts seront les délais d’attente.

Pour la loi, sperme = ovules

En tout cas, la loi française n’a pas entendu ces arguments et a mis sur le même plan don de sperme et don d’ovules : gratuité et anonymat sont désormais la règle, afin que les pressions sur les donneurs ne soient pas trop fortes et que les receveurs n’aient pas non plus l’impression d’avoir une dette trop lourde envers quelqu’un.

Effectivement, les femmes choisissant le don anonyme d’ovocytes disent souvent que, si elles se sentent redevables, c’est à la science en général qu’elles doivent quelque chose : cette science qui a permis à des femmes stériles comme elles, traitées pour fécondation in vitro, de donner leurs ovocytes pour tenter une autre fécondation in vitro dont bénéficiera une receveuse. Elles apprécient la médiation de la technique médicale.

D’autres, au contraire, préfèrent faire le choix d’une donneuse et d’une filiation. Les plus déterminées vont donc aujourd’hui se faire traiter à l’étranger pour que soit pris en compte leur désir. C’est la loi qui, par ses restrictions, a engendré une bonne part du tourisme médical que l’on constate aujourd’hui.

On ne peut pas dire aujourd’hui ce qu’en pensent les enfants. Les premiers nés en France par cette méthode-là ont vu le jour à la fin des années 1980. Mais on peut penser que choisir le don direct, c’est aussi un signe que l’on peut dire sa stérilité qui, dès lors, n’est plus pensée et vécue comme une blessure narcissique irréparable.

Don d’embryon et prêt d’utérus


Le don d’embryon


Une dizaine de couples bénéficient chaque année, en France, d’un don d’embryon. En 1991, on en a ainsi dénombré exactement 13 : ne peuvent prétendre à ce don que les couples dont les deux membres sont victimes d’une stérilité, en général, absence d’ovules pour la femme et sperme infécond pour l’homme. Les embryons réimplantés ne sont pas produits sur mesure pour eux. Ce sont des embryons dits « surnuméraires », obtenus lors de tentative de fécondation in vitro par d’autres couples et dont les géniteurs ne veulent plus disposer. On évalue le taux de naissances avec des embryons congelés à environ 3 %.

On estime qu’en France quelque 70 000 embryons sont congelés dans les banques publiques (Cecos) et les banques privées ; 70 % seront réimplantés dans les 3 ans chez leur génitrice ; 16,5 % seront de la même façon réutilisés après 3 ans de congélation ; environ 10 % ne font plus l’objet d’aucun projet parental ; enfin 2 % sont « abandon-nés », les parents ne se manifestant plus pour cause de décès, de divorce ou de déménagement. On évalue donc à quelque 2 000 le nombre d’embryons disponibles en laboratoire, qui ne seront jamais réclamés par leurs géniteurs. Des embryons qui pourraient en principe être disponibles pour d’autres couples.

La Norvège, l’Allemagne… interdisent ce type de don. Les États-Unis l’autorisent même sous des formes mercantiles. En France, le Comité national d’éthique, mis en place en 1983 pour donner son avis sur les problèmes de société posés par les avancées biomédicales, l’a autorisé dès 1989 à deux conditions : que ce don soit gratuit, volontaire et anonyme et qu’il provienne d’embryons surnuméraires congelés sur lesquels les géniteurs n’ont aucun projet familial. La loi de 1994 a repris ces exigences. L’embryon ne doit pas être produit à la demande expresse d’un couple dont les deux membres sont stériles, mais il doit être le don d’un autre couple, traité par fécondation in vitro et qui n’a plus de projet parental pour les embryons congelés dont il dispose. L’autre alternative proposée à ces couples ne sachant que faire de leurs embryons surnuméraires est de les donner à la science, en vue de recherches. Dans tous les cas leur consentement écrit est exigé.

Le don d’embryon n’est pas un acte psychologiquement simple. A l’inverse d’un don d’ovocytes, qui peut se vivre comme un don d’organe (comme un don de rein ou de moelle), le don d’embryon se vit véritablement comme un don d’enfant. Ainsi, moi-même, si j’ai accepté sans difficulté de donner mes ovocytes, je n’aurais pas pu supporter de savoir que mes embryons, conçus le même jour que mes jumeaux Pauline et Adrien, étaient donnés à un autre couple.

Pour ceux qui sont devenus parents par la Fiv, ces quelques cellules conservées au froid sont toujours perçues comme des enfants en devenir. Le visage et les rires des bambins rappellent toujours qu’au premier jour de leur conception, ils étaient exactement semblables à ceux qui sont aujourd’hui encore congelés. Et ceux qui ne veulent plus d’autre enfant acceptent souvent de les donner à un couple stérile uniquement pour éviter qu’on ne les détruise.

Les mères porteuses

Ce terme est utilisé indistinctement dans deux cas pourtant fort différents : soit la femme porte un embryon issu des ovocytes et du sperme d’un couple dont la conjointe n’a pas d’utérus fonctionnel, soit la femme se fait inséminer par le sperme du conjoint et porte l’enfant qu’elle restituera plus tard au couple dont la conjointe n’a ni utérus ni ovaire fonctionnels.

 Dans le premier cas, l’enfant aura la totalité du patrimoine génétique de ses parents, dans le second cas, il n’aura que le patrimoine génétique de son père, les gamètes féminins étant apportés par la mère porteuse. Certains préfèrent qualifier le premier cas de « mère porteuse » (parce qu’elle porte un embryon non issu de ses gamètes), et le second cas de « mère de substitution » (parce qu’elle remplace intégralement dans sa fonction ovarienne, génétique et utérine, la conjointe du couple).

L’acte, dit-on, était déjà pratiqué chez les Romains : un homme dont l’épouse était stérile pouvait emprunter ou louer temporairement l’épouse féconde d’un autre, le temps qu’elle lui donne des enfants qu’il élèvera ensuite avec sa conjointe. Les géniteurs et les receveurs se connaissent là parfaitement et la gratuité n’est pas à l’ordre du jour. Platon rapporte que Caton prêta son épouse à Hortensius…

Plus près de nous, en Grande-Bretagne, une loi interdit de mon-nayer et d’utiliser des intermédiaires dans le prêt d’utérus. Mais les couples qui s’engagent par contrat privé dans ce type d’aventure n’ont jamais été inquiétés par la justice. Aux États-Unis, la location d’utérus se pratique, notamment par l’intermédiaire d’agences. On parle de 50 000 dollars (soit quelque 300 000 francs). Plusieurs procès ont même défrayé la chronique, notamment parce que la mère porteuse subitement touchée par l’instinct maternel après l’accouchement refusait d’honorer son contrat.

 En marge des agences, cliniques et hôpitaux, des femmes aussi ont appris à s’arranger toutes seules en contrôlant leur ovulation et en s’inséminant avec le sperme d’un homme.

En France, la première mère de substitution s’appelait Patricia. Son histoire a été racontée dans toute la presse. Rappelons simplement que son contrat lui fixait une rémunération de 5 000 francs. Il y eut aussi le cas de ses deux vraies jumelles, l’une stérile et l’autre portant l’enfant conçu avec le sperme de son beau-frère. L’enfant, dit-on, n’est pas parvenu jusqu’à sa naissance…

Plusieurs associations ont aussi éphémèrement vu le jour : Les Cigognes, présidée par la même Patricia, sont nées en 1984 à Strasbourg. L’association regroupait 30 femmes âgées de 23 à 34 ans. Son but était de défendre les intérêts moraux et matériels des femmes qui se proposaient d’aider une femme stérile, en portant pour elle sa grossesse, de promouvoir et de valoriser cette démarche. Une des candidates explique.
Les Cigognes avaient établi un certain nombre de principes : la porteuse devait déjà avoir eu des enfants et ne devait travailler que pour un couple dont la femme était stérile. Elle était rémunérée 50 000 francs, payables en mensualités de 5 000 francs bloqués sur un compte et versés uniquement après l’accouchement et la restitution de l’enfant.

Les Cigognes, qui prétendent avoir reçu des demandes de 300 femmes stériles, n’ont pas vécu bien longtemps. L’association a été dissoute peu après, par décision du gouvernement.
Une autre association, Aima Mater, créée en 1985 et dissoute en 1988, affirme, elle, que pendant ses 3 ans d’existence elle a permis la naissance d’une centaine d’enfants. Les mères porteuses recevaient une indemnité forfaitaire égale à 10 mois de Smic.

Toutes ces associations – où le don sous-tendait aussi une rémunération et faisait apparaître des questions financières – ont été interdites par décret bien avant la promulgation de la loi de bioéthique. Elles fonctionnaient sur le même principe juridique : la mère porteuse à la naissance abandonnait l’enfant que l’homme du couple stérile reconnaissait. Puis la femme du couple stérile demandait à adopter l’enfant de son conjoint.

Sur la légalité de cette démarche, les juristes se sont un peu contredits. La Cour de cassation a finalement tranché en estimant que « la convention par laquelle une femme s’engage à concevoir et à porter un enfant pour l’abandonner à sa naissance contrevient tant au principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain qu’à celui de l’indisponibilité des personnes ». Et qu’en plus elle constituait un « détournement de l’adoption ».

Au-delà des questions juridiques, la maternité de substitution induit un certain nombre d’exigences (sanitaires, morales,…) auxquelles devra se soumettre la mère porteuse vis-à-vis du couple qui l’indemnise ou la rémunère : obligation d’abstinence sexuelle avant l’insémination pour avoir la garantie que la grossesse est bien produite par le sperme du couple, et, en fonction des fantasmes et désirs du couple, abstinence sexuelle durant la grossesse, régime alimentaire particulier, sans alcool ni cigarettes, et, pourquoi pas ? obligation d’écouter de la musique classique, interdiction de faire du sport…

Puis, que penser des relations que cette femme entretiendra pendant neuf mois avec cet enfant qui va grandir, bouger et lui envoyer des signes perpétuels de vie. Doit-elle s’interdire de l’imaginer au risque de s’y attacher ? Doit-elle ne le considérer que comme un objet qui satisfera ses besoins financiers, moraux, psychologiques ou physiques ? Est-ce vraiment œuvrer dans l’intérêt de l’enfant que de le porter en sachant qu’on devra l’abandonner ? Et que faire de l’enfant si, à sa naissance, on le découvre porteur d’un handicap ?

Hormis les cas rarissimes où la femme n’a pas d’utérus et veut ainsi faire porter à une autre l’enfant produit par les gamètes de son couple, nous avons vu que cette technique ne requiert pas l’aide d’un médecin pour être réalisée. Ne la considérant donc pas véritablement comme une aide médicale à la procréation, nous ne nous étendrons pas plus largement sur cette pratique.

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